Le document unique d'évaluation des risques professionnels

Établir son Document Unique d’évaluation des risques professionnels (DU, DUeR, DUeRP) est une obligation pour tous les employeurs en France depuis 2002. Souvent considéré comme un impératif administratif, celui-ci devrait plutôt être vu comme un allié de poids pour la bonne santé d’une structure (entreprise, association). En effet, le Document Unique est l’outil de base de toutes démarches de prévention QVCT, QVT et RSE. Le SSTRN vous présente donc une manière de mettre en place et de faire vivre le BON document Unique, c’est-à-dire celui qui fera progresser votre entreprise/association dans la prévention.
Un "bon" DU, qu’est-ce que c’est ?
Selon les professionnels du SSTRN, un Document Unique efficace et utile, possède les qualités suivantes :
Adapté à l’entreprise et Progressif
Le Document Unique doit présenter tous les risques auxquels sont exposés les salariés. Il est normal de ne pas tout anticiper dès la première version. L'important est de le faire évoluer régulièrement, en fonction des capacités et des besoins de votre organisation, pour tendre vers une exhaustivité progressive.
Collaboratif et partagé
Un Document Unique efficace est celui qui est élaboré en collaboration avec les salariés. Leur implication dès le début du processus est cruciale pour qu'ils s’inscrivent dans une réelle démarche de prévention et qu’ils la fassent vivre.
Compréhensible et communicable
Pour être utile, le Document Unique doit être accessible et compréhensible par les principaux intéressés, c’est-à-dire les salariés. Une rédaction claire et une présentation soignée sont donc indispensables pour garantir son efficacité.
Efficace
Un Document Unique efficace ne se limite pas au constat des risques. Il intègre un plan d’actions réaliste et suivi, permettant de réduire concrètement les expositions. Sans cela, le document reste théorique et perd son utilité.
Conforme à la réglementation
Le Document Unique vous permet de remplir votre obligation de moyens en matière de santé et de sécurité au travail. Pour rappel, le Code du travail donne toutes les obligations concernant l’établissement du DU et plus généralement sur l’obligation générale de prévention.
Le Document Unique accompagné de son plan d’actions de prévention vous permet de répondre à votre obligation de moyens.

Réglementation : ce que dit la loi
L’établissement du Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) est une obligation légale pour tout employeur depuis le 7 novembre 2002 (décret n°2001-1016 du 5 novembre 2001). Cette obligation s’appuie sur plusieurs articles du Code du travail, détaillés ci-dessous.
Articles L.4121-1 à L.4121-5 du Code du travail
L’employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures s’appuient sur neuf principes généraux de prévention (article L.4121-2) :
- Éviter les risques
- Évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités
- Combattre les risques à la source
- Adapter le travail à l’homme
- Tenir compte de l’évolution de la technique
- Remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas ou moins
- Planifier la prévention
- Prioriser les protections collectives sur les individuelles
- Donner des instructions appropriées aux travailleurs
Article R.4121-1 et R.4121-2
L’évaluation des risques doit être formalisée dans un Document Unique, qui comprend :
- Un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail,
- L’inclusion des risques liés aux ambiances thermiques.
Ce document doit être :
- Mis à jour au moins une fois par an,
- Actualisé à chaque modification importante des conditions de travail ou après un accident,
- Mis à disposition des salariés, représentants du personnel, service de prévention et inspection du travail.
Article R.4121-1-1
Depuis le 1er juillet 2016, l’employeur doit consigner, en annexe du DUERP, les données collectives utiles à l’évaluation des expositions individuelles aux 10 facteurs de risques professionnels liés à la pénibilité (ex. : bruit, travail de nuit, port de charges…).
L’absence de rédaction ou de mise à jour du DUERP constitue une infraction passible de :
- 1 500 € d’amende (contravention de 5e classe),
- 3 000 € en cas de récidive.
Le Document Unique est bien plus qu'une simple obligation légale ; c'est un outil stratégique pour protéger efficacement vos salariés et améliorer durablement la performance de votre organisation.
Comment faire son DUERP ?
1. La préparation
La phase de formalisation de l'engagement de la direction est cruciale pour la réussite de la démarche de prévention des risques professionnels.
Elle nécessite la constitution d'une équipe de travail représentative et l'utilisation d'outils adaptés pour élaborer et mettre à jour le Document Unique, tout en assurant une communication efficace et continue au sein de l'entreprise.
Les premières étapes
2. Identification des situations dangereuses
Les situations dangereuses sont toutes les situations pouvant conduire à un dommage, qu’il s’agisse d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle.
L’objectif est de rendre les situations dangereuses les plus explicites possibles de manière à ce qu’elle permette une représentation claire de la situation chez le salarié : évitez le vocabulaire technique (chute de plain-pied, TMS, …) et utilisez le vocabulaire de l'entreprise, soyez précis dans les localisations et sur le dommage éventuel.
Formaliser l'identification
3. Hiérarchisation des situations dangereuses
La hiérarchisation des situations dangereuses est une étape est cruciale pour assurer la sécurité des employés, la conformité réglementaire et l'efficacité opérationnelle.
Le but de la hiérarchisation est d'attribuer un niveau de risque à chaque situation dangereuse identifiée, en utilisant des systèmes de cotation qui intègrent généralement la gravité potentielle et la probabilité d'apparition du dommage.
Comment hiérarchiser ?
4. Plan d'actions
La Phase 4, dédiée au plan d'actions, est une étape essentielle pour structurer et de mettre en œuvre des actions préventives adaptées aux situations dangereuses identifiées.
Deux étapes sont nécessaires pour cette phase : définir les actions de prévention et établir votre plan d'action annuel.
Réaliser le plan d'actions
5. Mise en place
Théoriquement, cette phase est la plus facile à mettre en œuvre.
Quelques conseils pour que cette phase se déroule sans encombre :
- Prévoyez le mode de fonctionnement avec les responsables d’action.
- Planifiez la mise en place des actions en tenant de la charge des responsables d’action.
- Organisez le reporting avec les responsables d’action.
- Communiquer auprès des salariés avant, pendant et après la mise en place des actions.
6. Bilan
Comme le plan d’action, le bilan doit être annuel
Quelques conseils :
- Compilez les suivis d’action effectués au cours de l’année.
- Recensez ce qui a été fait et aussi ce qui n’a pu être mené à bien.
- Prenez l’avis des utilisateurs.
- Évaluez l’efficacité des actions.
Et ensuite ?
N'hésitez pas à faire appel à votre équipe santé travail qui pourra mettre en place un accompagnement personnalisé.
Atelier
Pour vous aider à la mise en pratique de ces éléments, nous vous invitions à participer à notre atelier Document Unique, transformez l'obligation en opportunité avec la démarche SSTRN !
Cela sera l’occasion pour vous de nous poser directement vos questions et d’échanger avec d’autres professionnels confrontés à des problématiques similaires ou complémentaires.

Les premières étapes
- S’assurer de l’appui et de l’intention de la Direction
Aucune démarche ne peut être viable et constructive si la direction n’est pas engagée dans celle-ci. - Constituer une Équipe de Travail
Formez une équipe représentative de l'entreprise, diversifiée en termes de profils et de métiers, et incluant les services supports. N’oubliez pas de solliciter le CSE s’il existe. Commencez par les salariés motivés et démontrez l'intérêt du processus pour les autres. - Choisir les Outils
Utilisez des outils accessibles pour construire votre Document Unique, disponibles en ligne ou via des logiciels dédiés. Le SSTRN propose des ressources pour vous guider dans cette démarche.
L’adhésion au SSTRN donne accès à l'outil collaboratif MDP (Mon Document Unique). L’accès à cet outil peut être déclenché suite à une visite d’un membre de votre EST et à la complétude d’un auto-diagnostic accessible via votre espace adhérent. - Recueil d’Information
Récupérez tous les documents internes et externes contenant des informations sur la santé, la sécurité et les conditions de travail au sein de l’entreprise. Le document le plus symbolique est la Fiche Entreprise fournie par le SSTRN, qui contient une première identification des situations à risque. Une fois récupérés, ces documents doivent être analysés afin de dégager des axes de travail, des priorités d’action.
Vous trouverez dans notre outil « Préparation » une liste indicative des documents nous semblant les plus utiles. - Communiquer
Communiquez clairement sur l'engagement de la direction, en utilisant des formats adaptés : politique SST, lettre d'engagement, note de service... Impliquez les salariés dans la démarche pour renforcer leur adhésion et leur participation active. Soyez transparent sur le calendrier, les objectifs et les mesures pour encourager l'engagement des salariés. Maintenez une communication transparente à chaque phase et donnez de la visibilité aux contributeurs et à tous les salariés. - Planifier la Démarche
Établissez un calendrier précis pour chaque phase de la démarche. Par exemple sur 6 mois : Organisation (mois 1), Identification des risques (mois 2 et 3), Hiérarchisation et plan d'action (mois 4), Suivi et ajustements (mois 5 et 6). Cela anticipe la mobilisation des ressources et donne de la visibilité aux salariés. - Définir les Unités de Travail
Cette phase, obligatoire sur le plan réglementaire, est essentielle mais peut parfois sembler complexe. L'objectif est de regrouper les salariés exposés aux mêmes risques de manière similaire. Cela simplifie la lecture du Document Unique, facilitant ainsi sa communication, et permet de répartir le travail de manière plus efficace.
Il existe plusieurs façons de constituer ces groupes, et aucune n'est parfaite : géographiquement (par atelier, par bâtiment, par plateau…), par métier (notamment lorsque certains métiers sont exposés à des risques spécifiques), ou encore par activité. La meilleure approche sera celle qui correspond le mieux aux spécificités de votre entreprise.
Le SSTRN propose la démarche suivante :- Regrouper les postes dont les activités principales sont similaires.
- Vérifier que ces postes soient soumis aux mêmes équipements, contraintes géographiques et /ou organisationnelles et refaire des regroupements si ce n'est pas le cas.
- Nommer ces regroupements de poste par : type d'activité (bureautique, responsable d'activité, utilisateurs de chariots élévateurs, chantier, intérimaires…), métiers (assistante administrative, mécanicien, commercial ...), découpage géographique (bureau, atelier, zone de chargement…).
- En complément nous vous recommandons de créer une unité « risques communs » dans lesquels vous pourrez ajouter les situations dangereuses impactant tous les salariés (Escaliers, ascenseurs, extérieurs…).
- Ces regroupements constituent désormais vos Unités de Travail.
Les ressources pour vous aider |
Comment identifier les situations dangereuses ?

- Description des Scénarios
Pour une même situation de travail, il peut exister plusieurs scénarios d'accidents différents. Décrivez chacun d'eux indépendamment (une ligne par scénario). Bien que cela augmente le nombre de lignes, cela améliore la compréhension, facilite la hiérarchisation des risques, et permet de définir des mesures de prévention ciblées. - Implication des Salariés
Ne travaillez pas seul ! Les salariés connaissent mieux que quiconque leur travail quotidien. Réalisez cette identification avec l’équipe que vous avez constituée et impliquez tous les salariés. Le fait d’avoir « découpé » votre entreprise en unités de travail va vous permettre de répartir les ressources et d’organiser le travail.
Vous pourrez également utiliser les informations récupérées lors de l’étape de préparation. - Identification des situations dangereuses
Pour identifier les situations dangereuses, suivez ces étapes :- Visite des lieux de travail.
- Entretiens avec les salariés.
- Observation du travail réel.
- Analyse des documents (Fiche Entreprise, compte-rendu des analyses d’accidents et incidents, analyse des fiches de données de sécurité…).
- Organisation de la remontée d’informations en cohérence avec les pratiques de l’entreprise : points sécurité, registre, adresse mail dédiée, groupe d’échange numérique, fiches signalement…
- Utilisez des ressources comme l'ED 840 pour vérifier l'exhaustivité de votre liste de situations dangereuses. Sachez que de nouvelles situations dangereuses seront régulièrement identifiées. L'identification des situations dangereuses est un processus d'amélioration continue.
Hiérarchisation des situations dangereuses
Afin de hiérarchiser les situations dangereuses, différents systèmes de cotation sont à votre disposition mais la plupart intègrent la notion de gravité potentielle et de probabilité d’apparition du dommage.
Pour schématiser :
- Quelle lésion cela pourrait-il générer en restant raisonnable ?
- Est-ce que ça risque d’arriver ?
Exemples de système de cotation :
- Gravité X Probabilité
- Gravité X Fréquence / Maîtrise
- Attribution d’un score de risque sans autre cotation
Échelles de Cotation
Dans tous les cas, le système de cotation ne peut être efficace que s’il est associé à des échelles de cotation bien définies. Celles-ci vont aider à objectiver la cotation. Ci-dessous un exemple pour l’échelle de gravité :
- Faible : 1 → accident bénin, dommage bénin sans arrêt de travail
- Moyen : 2 → accident ou maladie professionnelle donnant lieu à un arrêt de travail < 30 jours
- Grave : 3 → accident ou maladie professionnelle donnant lieu à une incapacité permanente ou partielle ou un arrêt > 30 jours
- Très grave : 4 → accident ou maladie professionnelle mortelle
Le SSTRN vous propose un système de cotation incluant la notion de maîtrise du risque. Des échelles vous sont également proposées dans notre outil.
Méthodologie
- Choisissez votre mode de cotation.
- Établissez les échelles de cotation et de probabilité.
- Pour chaque situation dangereuse, définissez les dommages potentiels.
- Attribuez un score de gravité en fonction de l’échelle définie.
- Déterminez les moyens de prévention existants.
- Attribuez un score de probabilité d’apparition.
- Enfin attribuez un score de risque en tenant compte des données gravité et probabilité.
Nos conseils pour vous aider Ce n’est pas la cotation qui fait la priorisation ! En effet, le score de risque est à prendre en considération pour la priorisation mais en complément d’autres données (cf. phase 4). |
Établir votre plan d'actions
1 . Définir les actions de prévention
Commencez par définir une piste d'action pour chaque situation dangereuse identifiée. Il est important d'utiliser les compétences de votre équipe de travail et de solliciter l'avis des salariés sur la faisabilité et l'acceptabilité des mesures de prévention.
2 . Établir votre plan d'action annuel
Dans un second temps, élaborez votre plan d'action de prévention annuel. Pour cela, il faut utiliser des outils comme PAPRIPACT ou d'autres actions spécifiques (ex. : L.4121-3).
Même si vous n’êtes pas directement concernés par l’obligation du PAPRIPACT (moins de 50 salariés), nous vous conseillons d’établir un plan d’action annuel et de désigner pour chaque action : un responsable, un calendrier ainsi qu’un budget.
Un modèle de plan d'action est disponible dans notre outil SSTRN pour vous guider dans cette démarche.
C’est durant cette phase que vous allez pouvoir approfondir les mesures de prévention que vous souhaitez et êtes capables de mettre en place durant l’année.
Pour les choisir, vous allez vous baser sur :
- La hiérarchisation des situations dangereuses dans votre Document Unique.
- L’impact que cela va avoir sur vos équipes (combien de salariés sont concernés ?).
- Les ressources à votre disposition (financière et humaine).
- Les priorités d’action définies dans l’engagement de la direction (cf. partie préparation).
- La faisabilité des actions (certaines sont plus faciles et rapides à mettre en place que d’autres).
- L’avis des salariés.
Pour définir précisément les mesures de chaque priorité d'action, utilisez le schéma ci-dessous, inspiré des neuf principes généraux de prévention. Il guide l'ordre de réflexion pour vos mesures de prévention. Il n'existe pas de solution miracle ; souvent, il faut combiner plusieurs mesures complémentaires (exemple : le capotage du compresseur bruyant et en complément le port de protections auditives pour les travaux à proximité directe le tout accompagné d’une sensibilisation au port de ces EPI ainsi que des consignes adéquates).
Toujours privilégier l'évitement du risque avant de chercher à le réduire.

L’implication de de votre équipe de travail est encore essentielle dans cette phase. Ceux-ci vous aideront à définir des actions réalistes et intégrant les contraintes réelles des postes. La sollicitation des salariés directement concernés par les mesures est également pertinente.
Nous vous recommandons d’ailleurs de ne pas hésiter à répartir les actions entre les membres l’équipe de travail, voir même d’en confier certaines aux salariés concernés (volontaires). Plus ceux-ci seront impliqués et plus la démarche de prévention vivra !
Attention à ne pas générer d’autres risques par la définition d’une mesure de prévention (exemple : ). Il arrive en effet, qu’une bonne idée sur le papier pose plus de problèmes qu’elle n’apporte de bénéfices. Essayez d’envisager les conséquences néfastes que peuvent avoir les mesures imaginées. L’expérience et l’expertise de vos salariés s’avèrent être des alliés précieux durant cette phase.
Après le bilan
Il faudra ensuite communiquer ce bilan à tous les salariés. Soyez transparent notamment sur ce qui n’a pu être fait (donnez les raisons objectives) et sur ce qui n’est pas aussi efficace que vous l’aviez envisagé.
Il ne vous reste plus qu’à faire tourner la roue de l’amélioration continue et mettre à jour :
- vos axes d’action prioritaires (politique prévention),
- votre identification des risques (de nouvelles situations dangereuses sont sûrement apparues durant l’année et vous les avez identifiées étant donné que vous avez mis en place un dispositif de remontée des infos),
- votre hiérarchisation des situations dangereuses (vous avez solutionné des problèmes donc les niveaux de risques ont évolué. Mettez-le en valeur !)
- et enfin votre plan d’action annuel.
OUTILS PRATIQUES
Le SSTRN vous propose en téléchargement un outil de préparation à l'évaluation des risques professionnels et un modèle de document unique complet pour vous guider dans l'identification et la hiérarchisation des situations dangereuses ainsi que le plan d'actions. Ce document pratique a pour objectif principal de vous aider à structurer la démarche d'évaluation des risques professionnels.
Un document Excel complet
Un document à s'approprier, qui vous guide pour évaluer chaque situation dangereuse en tenant compte de la fréquence, de la gravité et de la maîtrise actuelle des mesures de prévention. L’analyse qui en découle vous aidera à prioriser les actions à engager pour améliorer durablement les conditions de travail.
Un document préparatoire à partager
Un document pour ne pas oublier d'étapes dans la préparation. Un aide mémoire très pratique pour mettre en place une démarche structurée.